Certains redouteraient une dépression des lilas, un coup de blues chez les oiseaux. Erreur. Ce petit monde s’arrange : à peine le jour se fait-il plus long que la nuit, en avant ! Toute autre gourmandise est un luxe. C’est aux humains, comme d’habitude, qu’il en faut plus.
Patience : le printemps avance, sous le gris, sur la pointe des jonquilles, sous le bec têtu des mésanges. La lumière s’habille pour les longues soirées. Vous la trouverez en petite tenue, si belle, au vestiaire des aubépines
conclave sur les bancs. Nous voulons offrir aux premiers rayons nos blancs minois, chanter n’importe quoi, sortir trop tôt les sandales d’été. Nous voulons des pivoines, du basilic et même des barbecues.
En un sens c’est rassurant : onze heures d’ensoleillement mensuel au lieu de soixante-dix, et nous souffrons. Le faste des pixels ne suffit pas, les bourgeons électrifiés des enseignes ne nous fleurissent pas le cœur : nous souffrons. En pleine vogue de dématérialisation notre corps réclame l’immédiate connexion de la peau et de l’astre. Nous voulons des terrasses, du plein air, de jolies cyclistes en jupe légère, les enfants sur les toboggans, les mamies en
Ce ciel en calotte permanente de flanelle, comme un béret glauque descendu sur les paupières, à peine quelques lueurs de tisane tiède. On a beau se dire qu’il y a des choses plus graves, il n’y en aurait pas de moins grises quelque part ? Rendez-nous un bel hiver claironnant, un bleu du ciel glacé vodka, qu’on en finisse.
J’aime le gris, mais le gris n’est pas fait pour vivre seul. Cet hiver éteint l’aura surmené.
Gris du ciel. Gris du bitume, gris de l’ardoise. Gris du zinc et des pigeons, gris de Paris. Gris de bise, gris de crise.